Un collaborateur peut souhaiter interrompre sa carrière professionnelle quelques semaines ou mois, afin de se consacrer à un autre projet. Un congé non-payé peut alors être accordé à l’employé. Vous trouverez ci-dessous un aperçu des principales conséquences juridiques en droit du travail et en assurances sociales d’une telle interruption de carrière.
Puisque le droit suisse ne prévoit pas, à l’inverse du droit français, de droit à l’obtention d’un congé sans solde, celui-ci doit être accordé sous la forme d’une convention conclue entre l’employeur et l’employé. Il faut ainsi l’accord de l’employeur qui est donc libre d’accepter ou de refuser la demande de son collaborateur. En cas d’acceptation par l’employeur et pendant la durée du congé, les obligations principales découlant du contrat de travail sont alors suspendues. Ainsi, l’employé n’est plus tenu de fournir sa prestation de travail et l’employeur est libéré de son obligation de payer le salaire. Si le salaire est habituellement versé en treize fois, le treizième salaire sera également réduit proportionnellement à la durée du congé non payé. Si le contrat de travail prévoit une part de salaire en nature, comme la mise à disposition d’un véhicule ou d’un objet, il est présumé qu’il s’agit d’une remise à titre onéreux (moyennant une contre prestation financière de la part du travailleur), puisqu’habituellement fourni en contrepartie d’une prestation de travail. Partant, il convient d’appliquer les règles du contrat de bail (articles 253 ss CO) pendant toute la durée du congé. Une remise à titre gratuit peut également être convenue expressément, les règles du contrat de prêt (articles 305 ss CO) trouvant alors application. En matière de salaire encore, l’éventuel montant forfaitaire versé mensuellement pour indemniser les frais est également suspendu, étant donné que les frais encourus par le travailleur sont liés à l’exercice effectif de son activité.
Il convient d’attirer l’attention de l’employeur sur le fait que le congé sans solde ne fait pas partie de la liste exhaustive de l’article 335b al. 3 CO, prévoyant les différentes causes de prolongation du temps d’essai. En cas de prise d’un congé non-payé, les parties seraient alors privées de cette période ayant précisément pour but de vérifier que leurs attentes respectives seraient comblées par cette relation contractuelle. Ainsi, nous déconseillons fortement d’accorder un congé non-payé à un collaborateur se trouvant encore en temps d’essai. Précisons encore que la période de congé sans solde fait partie intégrante du décompte des années de service du collaborateur, puisque le rapport de travail est maintenu et que seules les obligations découlant du contrat de travail sont suspendues, respectivement limitées. Il convient donc d’en tenir compte lorsque l’on calcule la durée des rapports de travail, notamment en cas d’application de l’échelle de Berne selon 324a CO ou pour la détermination du délai de congé.
Qu’en est-il de la résiliation du contrat de travail par l’employeur durant le congé sans solde ? La résiliation est en principe valable (cette période ne faisant pas partie des cas de protection prévus à l’article 336c CO), mais il pourrait être contraire à la bonne foi de résilier le contrat d’un collaborateur à qui l’on vient d’accorder un congé sans solde. Ainsi, à notre sens, il convient de partir du principe que le licenciement est notifié au retour du collaborateur. De la même manière, lorsque le travailleur résilie son contrat, sa démission ne prend effet, à notre avis, qu’à après la fin convenue du congé sans solde. Le travailleur doit donc se présenter à son travail afin d’offrir ses services pendant son délai de congé, sans quoi l’employeur pourra, après être resté sans nouvelle à la suite d’une mise en demeure, constater un abandon d’emploi.
Sous l’angle du droit aux vacances, nous sommes d’avis que la prise d’un congé non payé a pour conséquence qu’aucun droit aux vacances n’est généré durant cette période-là. Ainsi, il ne s’agit pas d’une réduction du droit aux vacances selon 329b CO, mais le calcul du droit aux vacances se fera au pro rata, par exemple sur sept mois au lieu de douze en cas de congé sans solde d’une durée de cinq mois.
Les conséquences sont également importantes en matière d’assurances sociales. En matière d’assurance-vieillesse et survivants (AVS), l’employé doit s’annoncer à la caisse de compensation comme personne sans activité lucrative. Il restera assuré et versera des cotisations pour personne sans activité lucrative, sauf s’il est marié et que son conjoint verse des cotisations équivalant au moins au double de la cotisation minimale. La situation est en revanche plus complexe en matière de prévoyance professionnelle (LPP). En effet, l’employeur ne verse en principe plus aucune cotisation pendant la durée du congé non-payé, la couverture d’assurance contre l’invalidité et le décès prenant alors fin un mois après le versement du dernier salaire. Ces risques (importants !) n’étant dès lors plus couverts. En outre, si le seuil d’entrée de CHF 22'050.- de salaire annuel n’est plus atteint en raison du congé non-payé, le collaborateur peut s’assurer à titre facultatif. Dans tous les cas et pour chaque situation, il convient de contacter l’institution de prévoyance, chaque caisse disposant d’un règlement propre. Si la couverture d’assurance est maintenue par un biais ou par un autre, l’intégralité des cotisations peut alors être mise à la charge de l’employé. La question de l’assurance-accidents (LAA) doit également être abordée. La couverture d’assurance prend en effet fin à l’expiration du trente et unième jour qui suit celui où a pris fin le droit au demi-salaire au moins. L’employé peut prolonger l’assurance par convention spéciale, pour une durée maximale de six mois. Si le congé sans solde dure plus de six mois, le travailleur doit assurer sa couverture par le biais de son assurance maladie obligatoire.
En conclusion, lorsque les parties envisagent de se mettre d’accord sur la prise d’un congé sans solde, elles doivent garder à l’esprit les différentes conséquences juridiques d’une telle décision, tout particulièrement en matière d’assurances sociales. Nous conseillons vivement de détailler certains points dans la convention passée entre les parties. Celle-ci devrait en tout cas prévoir la durée du congé, les conséquences en cas de résiliation pendant la période de congé sans solde, le sort du montant forfaitaire alloué pour les frais (s’il y en a un), le sort du salaire en nature (à nouveau, s’il y en a un) ainsi que les conséquences sur le droit aux vacances. Doivent obligatoirement figurer les conséquences du congé sur les assurances sociales ainsi que la prise en charge exclusive par l’employé des cotisations pour la LPP, s’il en a été décidé ainsi.
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