L’employeur doit se contenter de constater un abandon d’emploi et non pas résilier les rapports de travail avec effet immédiat.
Un travailleur a été licencié mi-avril pour mi-juillet. Il devait prendre son solde de vacances juste avant. Comme il souffrait d’un genou, il a été opéré de ce fait le 22 juin; son employeur n’a été informé de cette intervention que la veille. Le même jour, il a activé sur sa boîte de courrier électronique un message automatique faisant état de son absence, en précisant que la date de son retour n’était pas connue. En outre, il a averti certains fournisseurs qu’il quitterait l’entreprise à la fin juin. Le 22 juin, l’employeur a résilié de manière immédiate le contrat de travail en raison du fait que le travailleur ne l’avait pas averti d’une intervention chirurgicale qu’il jugeait au demeurant non urgente et qu’il avait annoncé son départ à des tiers pour la fin juin alors qu’il ne devait initialement quitter l’entreprise qu’à mi-juillet. Subsidiairement, l’employeur a interprété le comportement du travailleur comme un abandon d’emploi.
Pour le Tribunal fédéral (TF), un abandon d’emploi n’est réalisé que lorsque le travailleur refuse consciemment, de façon intentionnelle et définitive, de poursuivre l’exécution du travail qui lui a été confié. Lorsque l’attitude du travailleur est équivoque, l’employeur doit le mettre en demeure de reprendre son activité.
En l’espèce, le TF a écarté la thèse de l’abandon d’emploi. Le fait d’informer des tiers de son départ de l’entreprise à fin juin alors qu’il était censé prendre des vacances avant la fin du contrat à mi-juillet, la création d’un message automatique du travailleur faisant état d’une absence ou la planification d’une opération durant le délai de congé, même sans en avertir l’employeur, ne trahissent pas l’intention du travailleur de quitter son emploi prématurément. Pour ce qui est de la résiliation immédiate en raison de la planification d’une opération jugée non urgente durant le délai de congé, le TF a jugé qu’elle ne se justifiait pas. En effet, l’opération était utile et appropriée et, quoi qu’il en soit, «aucune règle du droit du travail ne peut empêcher un travailleur de se faire soigner par des traitements correspondants aux affections dont il souffre, ceci au moment où il l’estime nécessaire».
Jean-Marc Beyeler, septembre 2021