L’employeur doit protéger et respecter la personnalité du travailleur (art. 328 du Code des obligations). S’il viole ce devoir dans un cas de harcèlement sexuel, il peut être condamné à payer une indemnité (art. 5 de la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes).
L'employeur doit prendre les mesures que l’expérience commande, qui sont appropriées aux circonstances et que l’on peut équitablement exiger de lui pour prévenir les actes de harcèlement sexuel ou y mettre fin. A défaut, il court le risque de payer une indemnité. C’est ainsi que, dans l’arrêt 4A_283/2022, le Tribunal fédéral a confirmé la condamnation d’un employeur à verser une indemnité à une ex-employée qui s’était plainte de harcèlement sexuel, considérant qu’il n’avait pas pris les mesures qui s’imposaient. Il a en effet été retenu que des instruments avaient certes été mis en place pour traiter les plaintes, mais que ceux-ci étaient mal maîtrisés par les responsables hiérarchiques. L’employeur avait également manqué de bienveillance et violé son devoir de protection en organisant une confrontation entre l’employé accusé de harcèlement et la travailleuse le jour-même où celle-ci avait dénoncé la situation, alors que son état ne le permettait pas (elle était alors en pleurs), qu’il n’y avait pas d’urgence et qu’elle s’était retrouvée seule face à des collaborateurs masculins.
Cette affaire a été l’occasion pour le Tribunal fédéral de préciser que le fait de n’avoir pas immédiatement dénoncé le harcèlement n’était pas propre à remettre en cause la crédibilité de la travailleuse. Au vu de la sensibilité du sujet, il n’y avait en effet rien d’étonnant à ce qu’elle n’eût pas osé exposer, en premier lieu, le harcèlement qu’elle subissait. Notre Haute Cour a également considéré qu’il n’y avait pas besoin de déterminer si la sensibilité de la travailleuse devait être prise en compte dans cette affaire, dès lors que le fait de toucher les fesses d’une collègue sans son consentement constituait un attouchement objectivement constitutif de harcèlement sexuel. Même les évidences ont, parfois, besoin d’être rappelées.
Laetitia Schriber, février 2024