3. Januar 2020
L’art. 337 du Code des obligations (CO) autorise aussi bien l’employeur que le travailleur à résilier immédiatement le contrat de travail en tout temps pour de justes motifs (al. 1). Constituent notamment de justes motifs toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d’exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (al. 2). Le juge apprécie librement s’il existe de justes motifs (al. 3).
Un manquement grave
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (TF), la résiliation immédiate pour de justes motifs est une mesure exceptionnelle qui doit être admise de manière restrictive. Ainsi, seul un manquement particulièrement grave peut justifier une telle mesure.
Par manquement, il faut entendre généralement la violation d’une obligation découlant du contrat de travail, mais, d’après le TF, d’autres incidents peuvent aussi justifier une telle mesure. En outre, ce manquement doit être objectivement propre à détruire le rapport de confiance essentiel au contrat de travail, ou du moins propre à l’ébranler si profondément que la continuation des rapports de travail ne peut raisonnablement pas être exigée. Le manquement incriminé doit de surcroît avoir effectivement abouti à un tel résultat. Lorsque le manquement est moins grave, il ne peut entraîner une résiliation immédiate que s’il a été répété malgré un avertissement.
Savoir si le comportement incriminé atteint la gravité nécessaire dépend des circonstances du cas concret. Il est donc difficile d’établir un catalogue de comportements susceptibles de justifier un congé immédiat.
Les critères d’appréciation
Dans son appréciation, le juge doit notamment prendre en compte la position et la responsabilité du travailleur, le type et la durée des rapports contractuels, la nature et l’importance des manquements. Il doit aussi considérer le temps restant jusqu’à l’échéance ordinaire du contrat.
A cet égard, l’importance du manquement doit être d’autant plus grande que ce laps de temps est court. Il s’ensuit que la réserve est particulièrement de mise lorsque le congé immédiat est donné durant le temps d’essai – qui se caractérise par la brièveté du délai de congé –, ou dans l’intervalle compris entre un congé ordinaire et l’échéance du contrat. Quant à la position du travailleur, sa fonction et les responsabilités qui lui sont confiées, elles peuvent toutes entraîner un accroissement des exigences quant à sa rigueur et à sa loyauté. Ainsi que le TF le souligne, «cela peut valoir pour un cadre comme pour une caissière de supermarché».
Dans une affaire, le TF a dû se pencher sur le cas d’une infirmière responsable de la garde de nuit d’un secteur d’une clinique psychiatrique, dont les patients étaient atteints de pathologies sujettes à un état suicidaire. Cette infirmière s’était, sans se faire remplacer, enfermée à clé dans une salle de repos, de telle sorte qu’elle ne pouvait entendre ni le téléphone ni la sonnette d’alarme, pas plus qu’elle ne pouvait contrôler la salle de soins pourtant vitrée et le tableau lumineux. Elle avait donc enfreint des directives pourtant clairement mises en place par l’employeur, qui insistaient particulièrement sur l’importance qu’il accordait à la présence et à la visibilité de l’infirmière en vue d’assurer la sécurité et la santé des patients qui lui étaient confiés. De plus, l’infirmière, surprise par un contrôle inopiné de sa cheffe, avait tenté de dissimuler son manquement par un mensonge, avec la complicité d’une aide-soignante. Même si aucun patient n’avait subi d’inconvénient dû au manquement de l’infirmière cette nuit-là, le TF a jugé que ce dernier devait être considéré comme grave, vu la situation, et que, doublé d’un mensonge, il avait irrémédiablement entamé la confiance de l’employeur, au point qu’on ne pouvait plus raisonnablement exiger la poursuite des rapports de travail jusqu’à l’échéance ordinaire du contrat. Le congé immédiat était justifié.
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